Durant la matinée du vendredi 20 janvier 2006, les services de secours londoniens furent submergés de curieux appels. Une baleine aurait été repérée dans la Tamise ! Ce n’était pas une hallucination, une jeune baleine à bec venait en effet de passer en-dessous de Westminster Bridge. Le cétacé, surnommé “la baleine de la Tamise” semblait s’être perdue, puisque son habitat se trouve normalement bien loin de Londres, au large de l’Ecosse du Nord, dans les eaux de l’Océan Arctique. Ce fut la première fois qu’une baleine fut aperçue dans la Tamise depuis le début des observations en 1913.

La baleine à bec commune, un mammifère marin pouvant atteindre jusqu’à 5 mètres de longueur et un poids de 7 tonnes, est une espèce assez rare, qui peut plonger à plus de 1400 mètres, chassant les calamars géants dans l’obscurité des profondeurs.

la baleine de la tamise

La baleine de la Tamise

Une opération de sauvetage gigantesque fut mise en place pour essayer de sauver la “baleine de la Tamise” en la reconduisant vers la Mer du Nord. C’était une course contre la montre. Le cétacé n’avait pas l’air en très bonne santé, victime d’une collision avec un navire et de multiples échouages à marée basse.

Ce n’est que le lendemain matin, lorsque la baleine s’échoua une nouvelle fois près d’Albert Bridge, que les sauveteurs purent capturer l’animal pour l’examiner. Après un examen approfondi, la baleine fut délicatement déposée par une grue sur une barge près du pont de Battersea. L’excitation était à son comble : des milliers de curieux contemplaient le spectacle depuis les berges du fleuve, alors que de nombreux hélicoptères des chaînes télévisées survolaient le théâtre des opérations. Le monde entier pouvait suivre le sauvetage en direct.

Malheureusement, la baleine était trop faible et elle ne résista pas au voyage qui aurait du la ramener vers la Mer du Nord. Elle fut prise d’une série de convulsions et décéda le soir du samedi 21 janvier 2006. Son squelette est désormais exposé au Musée des Sciences Naturelles à Londres.

 

Bien que l’apparition d’une baleine dans la Tamise soit un phénomène d’une extrême rareté, Londres fut jadis un centre important de l’industrie baleinière européenne. Tout au long du 18e siècle, des navires baleiniers quittaient les quais de Greenwich et du Surrey en direction de la Mer du Nord, de l’Atlantique Nord et des régions arctiques. Un cétacé mâle rapportait jusqu’à 400.000 livres sterling actuelles. Le “Greenland Dock” était à l’époque l’un des plus grands docks au monde et tenait son nom des “Greenlanders”, les chasseurs de baleine qui s’aventuraient au large du Groenland.

Greenland Dock Londres

L’industrie baleinière londonienne s’est éteinte au début du 19e siècle, au bénéfice d’autres centres portuaires. Dans les décennies qui suivirent, la pollution industrielle transforma la Tamise en véritable égout à ciel ouvert, rendant toute vie marine impossible. En 1957, la Tamise fut déclaré “biologiquement morte” sans réel espoir d’amélioration.

The Ship and Whale pub Londres

The Ship and Whale, témoignage historique de l’industrie baleinière londonienne.

Heureusement, les temps ont bien changé et la protection de l’environnement est aujourd’hui une priorité.  Maintenant que le fleuve s’est refait une santé, les mammifères marins reviennent en nombre coloniser les eaux de la Tamise, et pas uniquement dans l’estuaire. Entre 2004 et 2014, les Londoniens ont signalé la présence de 2782 phoques, dauphins, marsouins et baleines au centre de la ville. Des groupes de marsouins furent même signalés aussi loin que Kew, dans le sud-ouest de Londres.

mammiferes marins tamise

Les mammifères marins de la Tamise

Depuis 2004 le grand public est activement mis à contribution afin de répertorier officiellement la population de mammifères marins dans la Tamise. Toute observation peut être signalée à la Zoological Society of London via le compte Twitter @OfficialZSL.

Cliquez sur l’image pour découvrir une carte interactive des signalements de mammifères marins dans la Tamise.

carte interactive mammifères marins Tamise