À de nombreuses reprises j’ai eu l’occasion de lire des récits consacrés à la pratique de la natation dans la Tamise. Le sujet a même fait l’objet d’un ouvrage intitulé Downstream, publié en 2015 par Caitlin Davies. Est-ce vraiment une bonne idée de plonger tête première dans la Tamise ? A-t-on depuis toujours nagé dans la Tamise ? Quels sont les lieux privilégiés pour la pratique de la natation dans le fleuve ? C’est ce que je vous propose de découvrir dans cet article.
Tout d’abord sachez qu’il faut aujourd’hui obtenir une autorisation en bonne et due forme pour s’adonner à la natation dans la Tamise entre Putney Bridge et CrossNess (juste après la Thames Barrier) en raison des dangers que présente cette activité dans une section fort fréquentée du fleuve. Vous pouvez trouver toutes les informations à ce sujet sur le site de l’autorité gestionnaire du Port de Londres (PLA).
Piquer une tête au London Eye peut être tentant pour décrocher des réactions sur Instagram mais le passage incessant des bateaux ainsi que la piètre qualité de l’eau au centre de Londres n’invitent pas vraiment à la baignade. Il fut ceci dit un temps où l’eau était encore moins ragoûtante, quand le fleuve était tout bonnement un égout à ciel ouvert, qui collectait toutes les ordures de la ville. Depuis la fin du 20ème siècle, les choses se sont fortement améliorées et la biodiversité a peu à peu repeuplé la Tamise. Mais les risques de gastro n’ont pas disparu.
Hormis la sensation désagréable de prendre la tasse dans une eau peu cristalline, le principal danger reste l’hydrocution (risque accentué lors de fortes chaleurs et/ou en état d’ébriété) ainsi que le fait d’être pris au piège des courants qui s’agitent sous la surface, la Tamise étant un fleuve maritime, soumis au rythme incessant des marées.
LIDOS SUR LA TAMISE
Il existait jadis des bains flottants (parfois à ciel ouvert) en divers endroits de la Tamise. Cette activité était très populaire à l’époque victorienne.
Un superbe exemple d’architecture édouardienne, le Thames Lido de Reading (inauguré en 1902), perpétue cette tradition à quelques mètres du fleuve (il ne s’agit pas à proprement parler d’un lido aménagé sur la Tamise).
Un projet intitulé Thames Baths est actuellement à l’étude pour relancer un lido en plein coeur de Londres, à hauteur de Blackfriars.
THÉÂTRE D’EXPLOITS SPORTIFS
La Tamise fut le théâtre d’un formidable exploit sportif en 1927. Mercedes Gleitze, la première femme anglaise qui traversera la Manche à la nage, s’entraîna dans le fleuve en parcourant pas moins de 193 km (120 miles) en l’espace de 12 jours du pont de Westminster jusqu’à l’embouchure, prolongeant son effort jusqu’à Folkestone ! Pour la petite histoire, elle portait à son poignet une Rolex Oyster lors de sa traversée de la Manche. Un beau coup de pub pour l’horloger suisse.
En 1726, c’est Benjamin Franklin, futur père fondateur des Etats Unis, qui, à la faveur d’un séjour londonien, poussa une pointe de Chelsea à Blackfriars, soit pas moins de 5,6km… et retour ! Peu de gens savaient nager à l’époque et sa prestation athlétique, alternant crawl, brasse et dos crawlé, fit forte impression.
Il faut remonter à l’époque Tudor, en 1587, pour découvrir le premier traité anglais sur la pratique de la natation, The Art of Swimming, par Everard Digby. On imagine les lecteurs de cet ouvrage s’exercer aux abords de l’abbaye de Westminster ou dans les méandres de Richmond. Notons à cet égard que la mort par noyade représentait au 16ème siècle près de 50% des cas de mort violente, une statistique que l’on peut attribuer à l’activité frénétique qui animait les bords du fleuve (bateaux taxis, transport, moulins à eau, abreuvement des bêtes,…) à une époque où très peu de gens maîtrisaient l’art de nager.
Plus proche de nous, c’est en 1892 que fut lancée la Henley Classic qui réunit chaque été plusieurs centaines de nageurs sur une distance de 2,1km, en préambule à la fameuse Henley Royal Regatta.
Moins sportifs mais apparemment fort populaires, les Hot Tugs, une sorte de jacuzzi mobile, furent récemment lancés non pas sur la Tamise mais sur le Regent’s Canal, un autre cours d’eau de la capitale. Il ne s’agit pas ici de nager mais juste de se laisser dériver, une coupe de bulles à la main en saluant les riverains. So British.